C’est un peu à rebours que nous avons décidé de regarder la saison 1 de The Sinner sur Netflix et si l’on peut déjà affirmer une chose c’est que la réputation et le succès de la série sont loin d’être usurpés. Diffusée sur la plateforme depuis novembre 2018, la mini-série policière suit l’histoire de Cora, une jeune mère qui semble plutôt heureuse en ménage mais qui va créer une onde de choc un après midi d’été sur la plage en poignardant à mort Frankie Belmont, un parfait inconnu.
Dans le sombre labyrinthe de l’esprit
Si le premier épisode est particulièrement éprouvant émotionnellement, il laisse, cependant, derrière lui tellement d’interrogations que vous ne pourrez vous en affranchir. Vous n’aurez ainsi qu’une seule question en tête : qu’est-ce qui a bien pu pousser cette femme sans histoires à commettre un acte d’une si grande violence ? C’est à partir de là qu’il va falloir tirer sur le fil d’une pelote bien emmêlée : entre la réminiscence sourde d’une soirée où tout a basculé, les bribes d’une enfance dictée par une éducation religieuse stricte et la culpabilité pesante d’une soeur malade.
Un duo abîmé par les blessures du passé
Dans le rôle de Cora, Jessica Biel nous livre ici un portrait énigmatique, difficile à cerner (comme le mobile du crime d’ailleurs) prise dans les filets d’une torpeur qui ne semble jamais en finir. Avec Bill Pullman qui incarne l’inspecteur Harry Ambrose (et dont le visage nous était familier car vu dans Lost Highway de David Lynch), elle va former un duo abîmé par des blessures du passé qui n’attendent qu’une chose : déterrer les éléments qui libéreront la parole et les souvenirs.
Une atmosphère poisseuse et magnétique tout à la fois
Côté intrigue, The Sinner sait habilement délivrer les bonnes clefs aux bons moments. La série parvient à surfer sur plusieurs temporalités sans jamais perdent le téléspectateur dans une vision confuse des événements. Et pourtant il y avait matière à égarer le public car sur la série plane une atmosphère poisseuse, à la limite du soutenable.
La musique : un personnage malsain de l’intrigue
La bande originale obsédante contribue aussi largement à créer ce malaise qui continue de vous habiter de longues heures après. La musique constitue d’ailleurs un des éléments majeurs de l’intrigue : c’ est l’écoute d’une chanson en particulier qui déclenche le meurtre. Intitulée “Huggin and Kissin” , ce titre n’est pas l’émanation d’un petit groupe d’étudiants comme il est décrit dans le récit mais bien celui de Big Black Delta, un groupe de synthpop.
Le motif creepy du papier peint
The Sinner est aussi une expérience visuelle : le papier peint avec son motif creepy qui revient en flashback (que vous pouvez même acheter ici pour des nuits avec cauchemars garantis ;-)), les tests de Rorschach qui rythment le générique ajoute à la tension et au magnétisme de la série.
Une forte charge érotique
Et puis, il y a la sensualité, omniprésente, troublante car elle se situe parfois à l’endroit où l’on ne s’attend pas. C’est aussi une traversée intérieure qui consiste à déjouer les frasques d’un esprit traumatisé … un long chemin pour raccorder les événements et faire resurgir les zones d’ombres.
Quelques petites imperfections cependant…
Enfin, si la série nous a clairement happée, elle n’est cependant pas exempte de défauts. Certaines pièces du puzzle ont du mal à s’imbriquer. [ATTENTION SPOILER, ne pas lire la suite si vous n’avez pas vu la série en entier] On s’interroge tout de même sur le fait que la disparition de Phoebe n’ait pas plus ému sa mère qui s’était pourtant battue avec ferveur pour la maintenir en vie.
En dehors de ces petites ficelles mal dégrossies, The Sinner, par son identité qui obsède autant qu’elle repousse, ne devrait pas avoir à faire rougir Petra Hammesfahr, l’auteur du roman dont la série s’est inspirée. Série devenue d’anthologie, il reste désormais à savoir si la saison 2 sera à la hauteur de ce premier opus fascinant.